Revue 48 : Au coeur du palmier dattier – Automne 2010
<img119|right>
SOMMAIRE
– Portrait: Nordine Bensaadoun
– Agriculture : oasis du mzab
– Cacographie fruitière : des palmes et des palmiers
– Technique : le bayoud
– Botanique : le palmier parmi les dattiers
– Cahier central : le palmier dattier
– Technique : le charançon rouge
– Nutrition et santé : valeur de la datte
– Histoire et mythologie : de la datte et du dattier
– Usages : l’automne de l’abondance
– Lu pour vous
– Fiche fruitière
—-
EDITO
Leçons des oasis
Le désert du Sahara, peau de panthère tachetée d’oasis, accoste au sud de la Méditerranée et s’enfonce profondément dans le ventre de l’Afrique, vers les savanes tropicales. La désertification gagne chaque année des millions d’hectares dans les zones arides chaudes. Si voisines, si riveraines de nous. Une espèce d’arbre, seul, parvient à à assurer la permanence des communautés humaines dans ces régions les plus chaudes du globe : le palmier dattier.
Une herbe géante, majestueuse et résistante à toutes les extrémités -soleil, température, vent de sable et salinité- est « La » plante ressource, jalousement élevée par les sociétés oasiennes depuis le néolithique. Ces agriculteurs spécialisés, on les nomme phoeniciculteurs (cultivateurs de Phoenix, le nom latin donné au palmier). Pour eux, leur arbre est tout à la fois : la nourriture et le commerce, le bois et l’habitat, le médicament et l’outil, l’ombre et le destin. Le palmier dattier, pivot d’un système agraire écologique et autonome est bien une plante-civilisation. Comme en leur temps l’ont été le figuier, le châtaignier, arbres nourriciers qui ont soutenu durablement, et pendant des siècles, des sociétés dans les terres pauvres du pourtour de la Méditerranée.
Il y a aussi que le dattier est, en plus, irremplaçable… Au Sahara, les néo-cultivateurs modernes qui ont essayé de cultiver autre chose (oliviers, blés…) sur les sols squelettiques des zones hyperarides, sont vite revenus à l’évidence : il fallait aussi planter du palmier pour espérer durer. C’est une première leçon. On ne peut pas faire pousser tout et n’importe quoi n’importe où.
Mais les temps changent. Le climat aussi. Les évidences pour les agriculteurs se multiplient. N’a-ton pas vu l’année dernière, pour la première fois de mémoire de cultivateur de dattier au Mzab, des floraisons en décembre, soit trois à quatre mois plus tôt que d’habitude? Face à ces dérèglements cosmiques (à l’origine bien humaine), comment assurer que le palmier continue à produire? Il y a une réponse des communautés oasiennes : il faut entretenir la diversité. C’est une deuxième leçon : le patrimoine hérité des générations anciennes de cultivateurs d’oasis est riche de milliers de variétés que l’on trouve dans les jardins des vieilles palmeraies… C’est dans cette biodiversité cultivée qui produit une extraordinaire gamme de dattes de formes, couleurs, précocités variées, que se trouvent les clés des adaptations futures.
Robert Ali Brac de la Perrière, association BEDE.
<emb122|left>